LA VENTE IMMOBILIERE EN VIAGER
Définition et présentation
La vente d'immeuble contre rente viagère est le contrat par lequel en contrepartie de l'aliénation d'un immeuble à son profit l'acquéreur dénommé le débirentier s'engage à payer périodiquement à son vendeur, dénommé le crédirentier, pendant la durée de sa vie ou de celle d'un tiers des arrérages représentant tout ou partie du prix de vente de l'immeuble. La vente en viager est souvent utilisée par des propriétaires âgés qui souhaitent disposer, en complément de leur retraite, de revenus périodiques. Le contrat de vente d'un bien immobilier stipulant la constitution d'une rente viagère est un contrat aléatoire tel que défini parles articles 1104 et 1964 du Code civil. Selon l'article 1104 du Code civil : «le contrat aléatoire est le contrat dans lequel l'équivalent pour les parties consiste dans la chance d'un gain ou de perte en raison d'un événement incertain». Selon l'article 1964 du Code civil : " une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain. Tels sont : Le contrat d'assurance, Le jeu et le pari, Le contrat de rente viagère". L'originalité de la vente en viager tient à la nature particulière de sa contrepartie, elle est soumise au droit commun des ventes d'immeubles notamment en ce qui concerne les conditions de forme du contrat, de capacité juridique, de pouvoir des parties ou encore de consentement et à des conditions spécifiques.
La formation du contrat de vente immobilière moyennant rente Viagère
Comme toutes les ventes immobilières, la vente en viager nécessite l'interventiond'un Notaire. Le bien immobilier devient la propriété de l'acheteur dès la signature de l'acte.
Qui peut vendre en viager ?
Tout propriétaire ayant la capacité juridique et le pouvoir de vendre son immeuble. Les parties doivent donner un consentement libre et éclairé et ne doivent pas être frappées d'une incapacité d'exercice ou de jouissance.
La nullité de l'acte serait encourue en cas d'altération des facultés mentales de l'une des parties.
Le vendeur sera souvent considéré comme la partie faible au contrat en raison du contexte de l'opération, de son âge, et du caractère alimentaire que présentera pour lui la rente.
Sa capacité au moment de l'acte et les vices du consentement seront appréciés avec d'autant plus d'attention que la vente comporte un aléa faisant courir un risque patrimonial.
La vente d'un bien immobilier d'un majeur soumis à un régime de protection est possible si elle devient nécessaire ou si cela est de son intérêt.
Elle est soumise à des conditions particulières prévues par l'article 426 alinéa 3 du Code Civil selon lequel: " ... S'il devient nécessaire ou s'il est de l'intérêt de la personne protégée qu'il soit disposé des droits relatifs à son logement ou à son mobilier par l'aliénation, la résiliation ou la conclusion d'un bail, l'acte est autorisé par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué, sans préjudice des formalités que peut requérir la nature des biens.
L'avis préalable d'un médecin inscrit sur la liste prévue à l'article 431 est requis si l'acte a pour finalité l'accueil de l'intéressé dans un établissement. Dans tous les cas, les souvenirs, les objets à caractère personnel, ceux indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades sont gardés à la disposition de l'intéressé, le cas échéant par les soins de l'établissement dans lequel celui-ci est hébergé."
Le consentement des parties doit également être exempt de vices en vertu de l'article 1109 du Code civil aux termes duquel :" Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol."
En cas de vente du logement des époux, le consentement des deux époux est nécessaire en vertu de l'article 215 alinéa 3 du Code Civil aux termes duquel
"Les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut en demander l'annulation : l'action en nullité lui est ouverte dans l'année à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial s'est dissous.
Le contrat de vente d'un bien immobilier stipulant la constitution d'une rente viagère est soumis aux divers droits de préemption et notamment à celui du preneur.
Quelles sont les conditions de validité spécifiques du contrat de vente d'un bien immobilier stipulant la constitution d'une rente viagère ?
Comme tout contrat aléatoire, la vente d'un bien immobilier moyennant rente viagère impose, pour sa validité, un aléa véritable au moment de la formation du contrat.
Qu'est ce que l'aléa ?
L'aléa est un événement incertain qui détermine le gain de l'un et la perte de l'autre. Il s'agit d'un événement qui relève du hasard. Dans le cadre de la vente immobilière en viager l'aléa suppose que les parties au contrat ignorent le nombre de versements périodiques à effectuer.
Quand l'aléa doit il exister ?
Cet aléa doit exister au moment de la formation du contrat ( Civ. 3e, 4 juill. 2007, no 06-14.122) et pour les deux parties à égalité.
L'aléa ne doit pas dépendre de l'une d'elle et doit résulter du même événement.
La validité de la rente viagère est subordonnée à l'existence d'un minimum d'aléa.
Un risque suffisant doit avoir été couru par chacune des parties au contrat.
L'aléa suppose qu'à la date de la formation du contrat, les parties ne soient pas en mesure d'apprécier l'avantage, qu'elles retireront de l'accord parce que celui ci dépend d'un événement incertain.
La réciprocité des aléas cause les obligations respectives des parties.
En l'absence d'aléa, la vente contre rente viagère est nulle pour défaut de cause en vertu de l'article 1131 du Code Civil selon lequel: "L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet".
Dans chaque cas d'espèce, l'existence de l'aléa est appréciée souverainement par les juges du fond qui recherchent si un risque effectif et suffisant a été couru par chacune des parties au contrat.
Quels sont les critères de l'aléa ?
Dans le cadre de la vente immobilière en viager les critères de l'aléa sont la durée de la vie du crédirentier et le taux de la rente.
La durée de vie du crédirentier telle que les parties peuvent l'estimer, lors de la conclusion du contrat de vente moyennant rente viagère, dépend de deux éléments essentiels, son âge et son état de santé.
L'appréciation de l'aléa s'effectue également tout naturellement en prenant en compte le taux de la rente qui doit être servie au crédirentier.
Aux termes de l'article 1976 du Code civil, la rente viagère peut être constituée au taux qu'il plaît aux parties contractantes de fixer.
La rente doit cependant être fixée à un montant suffisamment élevé pour maintenir un risque de perte pour l'acquéreur et à l'inverse une chance de gain pour le vendeur.
Dés lors que toute vente nécessite un prix réel et sérieux, il convient d'éviter que, par la fixation d'un taux trop faible, la constitution ne présente pas le caractère d'un contrat aléatoire à l'égard de chacune des parties.
Lors de la conclusion de l'opération, l'appréciation de l'aléa est subjective car personne ne peut connaître à l'avance la durée de vie du crédirentier et le montant effectif des arrérages qui seront versés.
En pratique, le montant de la rente est calculé à l'aide d'un barème établi en fonction des tables de mortalité et donc de l'espérance de vie en résultant à chaque âge envisagé.
Quels sont les cas d'absence d'aléa ?
1er cas envisageable : Le décès prématuré
Le contrat de rente viagère ne produit aucun effet si la rente a été créée sur la tête d'une personne qui était déjà morte au jour du contrat et ce, en vertu de l'article 1974 du code civil aux termes duquel :
"Tout contrat de rente viagère, créé sur la tête d'une personne qui était morte au jour du contrat, ne produit aucun effet".
Selon l'Article 1975 de ce même code : " Il en est de même du contrat pour lequel la rente a été créée sur la tête d'une personne atteinte de la maladie dont elle est décédée dans les vingt jours de la date du contrat".
Trois conditions doivent être réunies pour qu'il puisse être fait application de cette disposition : - la personne sur la tête de laquelle repose la rente devait être malade au moment du contrat , - sa mort doit avoir eu pour cause cette maladie et, - doit être survenue dans les vingt jours du contrat.
Dans une telle vente, le vendeur étant malade lors de la signature du contrat et condamné à mourir à bref délai, il n'y a ni risque de perte pour le débirentier, ni chance de gain pour le crédirentier de telle sorte que le contrat est dépourvu de tout aléa et sans cause.
La nullité prévue par l'article 1975 du Code Civil est d'ordre public (Angers, 29 juin 1897, DP 1901. 2. 369 ), ce qui signifie que les parties ne peuvent pas y déroger conventionnellement.
Elle s'applique même si les intéressés n'ont pas eu connaissance de la maladie.
Le délai de 20 jours se calcule à partir du moment où la convention de constitution de rente viagère est devenue parfaite par l'échange des consentements ( Cass 1ere Chambre Civile 21 octobre 1969 n°68-11544). Le point de départ peut donc commencer à courir à compter d'une promesse de vente sous seing privé et pas uniquement à compter de l'acte authentique.
En cas de rente viagère constituée sur plusieurs têtes, payable jusqu'au décès du dernier mourant et réversible en totalité, le contrat subsiste en dépit du décès de l'un d'eux dans le délai de 20 jours dés lors que l'un au moins des crédirentiers n'est pas décédé dans ce délai, que le montant de la rente reste inchangé et que la durée de son versement demeure dépendante de la durée de vie incertaine du ou des survivants.
Cette disposition légale ne s'applique pas lorsque le décès résulte d'un suicide (Orléans, 26 avr. 1860, DP 1860. 2. 98), même si celui-ci est la conséquence d'une affection psychique dont souffrait déjà le crédirentier lors de la conclusion du contrat (Caen, 22 nov. 1871, DP 1872. 5. 383).
C'est à celui qui invoque la maladie du crédirentier d'en apporter la preuve (Civ. 1re, 12 févr. 1963, JCP 1963. II. 13107)
2d cas envisageable : Une mauvaise définition des conditions financières du contrat
Suivant les termes de l'article 1976 du code civil, la rente viagère peut être constituée au taux qu'il plaît aux parties contractantes de fixer.
Le principe est donc celui de la liberté contractuelle en la matière.
La vente contre rente viagère peut cependant être privée de son caractère aléatoire si ses conditions financières n'ont pas été valablement déterminées et notamment en cas :
- de rente trop faible voir dérisoire ou, - de mauvaise estimation du bien cédé.
C'est la raison pour laquelle, une liberté totale ne saurait être accordée aux parties, lesquelles doivent tenir compte des revenus procurés par l'immeuble vendu serait nul, pour absence de prix, le contrat de vente d'un immeuble moyennant une rente viagère d'un montant inférieur ou simplement égal aux revenus produits par l'immeuble aliéné.
Dans la vente en viager le prix est constitué en tout ou partie, par une rente dont on ignore pendant combien de temps elle sera servie.
L'étendue exacte de la contrepartie que l'acquéreur devra finalement fournir au vendeur pour la propriété est donc inconnue au jour où les parties s'engagent.
Pour autant le prix est déterminé au sens de l'article 1591 du Code civil selon lequel à savoir que :
"Le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties dés lors que les parties ont fixé son montant et les modalités de son versement.
Les éléments permettant de déterminer le montant de la rente viagère sont notamment : - La valeur de l'immeuble ou des droits vendus diminués le cas échéant des droit conservés par le vendeur tels que par exemple la réserve d'un droit d'usage et d'habitation et/ ou de la fraction payée sous une autre forme qu'une rente telle que par exemple la stipulation d'un bouquet ou et/ d'une obligation de soins.
Le bouquet est une somme d'argent que le vendeur peut demander immédiatement. Il n'est pas obligatoire et, est librement fixé par les parties
Lorsqu'il y a un bouquet, on le déduit du prix de vente et l'on ne convertit en rente que le solde du prix, défalqué du bouquet.
Le vendeur peut également se réserver le droit de jouissance des lieux vendus sa vie durant par le biais d'une rente avec réserve d'usufruit ou d'un simple droit d'usage et d'habitation. Il s'agit alors d'un viager occupé.
Il est alors important d'organiser conventionnellement les rapports du vendeur et de l'acquéreur notamment s'agissant de la répartition des charges et de prévoir les modalités et délais de libération des lieux à l'extinction du droit en cas de décès ou de libération anticipée.
Le bien peut être également vendu libre de toute jouissance ou d'occupation, il s'agit alors du viager libre.
Les parties peuvent également convenir d'une obligation de soins mises à la charge de l'acquéreur.
Cette obligation constitue un aléa librement accepté susceptible de profiter à l'une ou l'autre des parties en fonction de la durée de vie du bénéficiaire ( Cass 3° 4 juillet 2007, n°06-13.275).
Pour apprécier la vileté du prix, les juges du fond énoncent qu'il convient de comparer les revenus de la propriété et des intérêts du capital qu'elle représente avec la valeur des prestations fournies (prestations correspondant à un prix en partie payable comptant, le solde étant converti en rente viagère, avec réserve d'un droit d'usage et d'habitation au profit du vendeur) Civ. 1re, 4 juill. 1995: Bull. civ. I, no 304.
En matière de vente d'une chose frugifère, la jurisprudence considère qu'il n'y a pas de prix réel et sérieux, si la rente viagère qui le représente est d'un montant inférieur aux revenus de cette chose.
Si le débirentier peut retirer de l'immeuble un revenu supérieur aux arrérages, il ne court aucun risque de perte et le crédirentier n'a pas de chance de gain.
Lorsque le vendeur s'est réservé la jouissance du bien vendu, l'appréciation de l'aléa et du caractère sérieux du prix se fait par comparaison entre le montant de la rente et les revenus calculés à partir de la valeur vénale au jour de la vente de l'immeuble grevé. ( Civ. 3e, 4 juill. 2007: Bull. civ. III, no 125)
L'appréciation des revenus du bien s'effectue in concreto, et il est tenu compte par le Juge dans son évaluation des circonstances propres à l'espèce.
Il sera ainsi tenu compte pour exemple du fait que le débirentier supporte des charges importantes pour entretenir l'immeuble cédé (Civ. 1re, 26 mars 1974) , qu'une partie du prix du bien a été versée en capital (Civ. 3e, 13 nov. 1986, Bull. civ. III, no 160), que le bien transmis a acquis une valeur ajoutée par le travail du débirentier (Civ. 1re, 24 oct. 1978, Bull. civ. I, no 319).
Au lieu des revenus, comme terme de comparaison, la jurisprudence considère parfois les intérêts du capital que représente la chose vendue ou même cumulativement les revenus et les intérêts.
Les juridictions du fond disposent d'un pouvoir souverain d'appréciation pour constater l'existence d'un prix réel et sérieux au jour du contrat.
Le prix est dérisoire et la vente doit être annulée, même si la rente versée au vendeur est supérieure aux revenus de l'immeuble, dans l'hypothèse où le grand âge ou l'état de santé du vendeur donne à redouter une fin prochaine qui se produit effectivement dans un très court délai.
- L'espérance de vie de la personne sur la tête de laquelle la rente est constituée. Dire que la rente est constituée sur la tête d'une personne signifie qu'elle sera servie aussi longtemps que cette personne sera en vie. La désignation de cette personne dans l'acte de vente est donc indispensable.
Le plus souvent la rente est constituée sur la tête du vendeur lui même mais les cocontractants sont libres de se référer à la durée de la vie d'un tiers l'Article 1971 du Code civil dispose ainsi :
"La rente viagère peut être constituée soit sur la tête de celui qui en fournit le prix, soit sur la tête d'un tiers, qui n'a aucun droit d'en jouir. "
L'application la plus courante de cette faculté concerne les ventes effectuées par des personnes morales car dés lors que l'aléa devant exister au moment de la signature du contrat résulte de l'indétermination de la durée de vie humaine, la rente ne peut être constituée que sur la tête d'une personne physique.
Selon l'Article 1972 du Code civil, la rente peut être constituée sur une ou plusieurs têtes.
Il s'agit du cas où la vente est consentie par plusieurs vendeurs tels que des époux ou des co-indivisaires ou lorsque le vendeur d'un bien propre souhaite qu'à son décès, la rente bénéficie à son conjoint survivant sa vie durant.
Au décès de chacune des personnes expressément désignées, le montant de la rente peut :
- soit être réduit proportionnellement il s'agit de la rente réductible, - soit demeurer intégralement servie aux survivants, il s'agit de la rente réversible.
Pour assurer l'équilibre des aléas pour chacun des contractants, la durée d'amortissement à prendre en compte pour le calcul de la rente correspond à l'espérance de vie de celui sur laquelle cette dernière est constituée.
La vente d'un immeuble moyennant une rente viagère peut, dans certaines circonstances particulières, déguiser une donation de ce bien dès lors que la rente stipulée est dérisoire par rapport à la valeur de l'immeuble aliéné.
Lorsque le caractère gratuit de la vente moyennant rente viagère est établi, les règles sur le rapport et la réduction des libéralités s'appliquent.
De ce fait l'acte peut être réduit pour atteinte à la réserve des héritiers.
L'EXECUTION DU CONTRAT
Quand et comment les arrérages de la rente sont ils réglés ?
En principe, les arrérages sont dus à compter du jour de la remise de l'immeuble mais les parties sont en droit de prévoir une date antérieure
Le débirentier doit payer les arrérages de la rente aux lieu et époque convenus au contrat, pendant toute la vie du crédirentier ou du tiers sur la tête duquel la rente a été constituée.
L'époque du paiement des arrérages est librement fixée par la convention des parties.
Quel est le délai de prescription de l'action en paiement des arrérages ?
Les actions en paiement des arrérages sont soumises au délai de prescription de 5 ans en application du délai de droit commun valable pour les actions personnelles ou mobilières ( article 2224 du Code Civil).
Le délai débute à chaque échéance prévue au contrat.
Ainsi pour les arrérages payables mensuellement, la prescription court à compter de chaque échéance mensuelle.
En principe, les arrérages ne peuvent être réclamés que s'il est justifié de la survie de la personne sur la tête de qui la rente viagère a été constituée.
Cette preuve est souvent rapportée par un certificat de vie délivré par un Maire ou un Notaire.
Le montant de la rente varie t'il au cours de l'exécution du contrat ?
La rente oblige le débiteur à des versements périodiques pendant une durée incertaine, stipulée en argent elle subit les effets de la dépréciation monétaire tandis que le bien immobilier lui prendra de la valeur.
Pour maintenir l'équilibre du contrat tout au long de son exécution, la loi édicte un principe de variation obligatoire des rentes viagères.
Ce dispositif permet d'éviter que le débirentier bénéficie de la plus value de l'immeuble et que le crédirentier subisse lui les effets de l'inflation monétaire.
En pratique, cet ajustement de la rente peut se faire de deux manières
- Par l'insertion dans l'acte de vente d'une clause d'indexation permettant la révision automatique du montant de la rente suivant, par exemple, un indice publié par l'institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
- Ou à défaut de disposition conventionnelle, par le système légal impératif d'actualisation prévu par la Loi n° 49-420 du 25 mars 1949 révisant certaines rentes viagères constituées entre particuliers.
Selon l'article 1 de ladite loi
"Sous réserve des dispositions des articles 2 et 4, les rentes viagères ayant pour objet le paiement par des personnes physiques ou morales de sommes fixées en numéraire soit moyennant l'aliénation en pleine propriété ou en nue-propriété d'un ou de plusieurs biens corporels, meubles ou immeubles, ou d'un ou de plusieurs fonds de commerce, en vertu d'un contrat à titre onéreux ou à titre gratuit, soit comme charge d'un legs de ces mêmes biens, sont majorées de plein droit selon les modalités prévues par l'article 2 de la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 portant majoration de certaines rentes viagères et pensions."
Le taux de majoration légale des rentes fixes constituées en contrepartie de l'aliénation d'un immeuble est révisé chaque année par arrêté du Ministre du Budget publié au journal officiel
Enfin, la loi du 25 mars 1949 confère au Juge un pouvoir de révision du taux des rentes viagères. Les règles de cette révision sont diverses et ne s'appliquent pas à toutes les rentes.
La rente viagère est elle soumise à l'impôt sur le revenu ?
Les rentes viagères sont soumises à l'impôt sur le revenu pour une fraction de leur montant, décroissante avec l'âge du crédirentier en vertu de l'article 158, 6 du Code Général des impôts aux termes duquel :
" Les rentes viagères constituées à titre onéreux ne sont considérées comme un revenu, pour l'application de l'impôt sur le revenu dû par le crédirentier, que pour une fraction de leur montant.
Cette fraction, déterminée d'après l'âge du crédirentier lors de l'entrée en jouissance de la rente, est fixée à:
- -70 % si l'intéressé est âgé de moins de 50 ans ;
- -50 % s'il est âgé de 50 à 59 ans inclus ;
- -40 % s'il est âgé de 60 à 69 ans inclus ;
- -30 % s'il est âgé de plus de 69 ans.
Les réparations et entretiens courants du logement ainsi que le paiement de la taxe d'habitation et des factures d'énergie restent à la charge du crédirentier sauf s'il libère totalement le bien vendu. De
son côté, le débirentier est tenu de déclarer les rentes versées au crédirentier.
Qui régle la taxe foncière ?
La taxe foncière est, en principe, à la charge du débirentier, à moins que les parties en aient décidé autrement.
Qu'elles sont les causes d'extinction du contrat de constitution de rente viagère ?
Il peut s'agir des causes générales à l'ensemble des conventions et notamment, de : - l'accord des parties pour mettre fin à la rente (Angers, 23 févr. 1897, DP 1898. 2. 161), - de la compensation dans l'hypothèse où le débirentier devient créancier du crédirentier ou encore, - de la renonciation pure et simple du crédirentier à ses droits, la rente viagère s'éteint si le crédirentier déclare y renoncer et dispense le débirentier du service des arrérages, à compter d'une certaine date.
Constituent également des causes d'extinction du contrat de constitution de rente viagère :
- Le décès du crédirentier
L'obligation de servir une rente viagère s'éteint, normalement, par la mort naturelle de la personne sur la tête de laquelle cette rente a été constituée.
Lorsque la rente viagère a été constituée sur la tête de plusieurs personnes, le décès de l'une d'elles ne met pas fin, sauf stipulation contraire, à la rente.
L'extinction ne se produira qu'au décès de la dernière survivante de ces personnes.
- un accord de rachat
Le fait d'aliéner un immeuble acquis moyennant la constitution d'une rente viagère ne suffit pas à libérer l'acquéreur du service de cette rente, pas plus d'ailleurs que de toute autre obligation personnellement assumée par lui envers son vendeur.
Pour permettre au débirentier d'être déchargé du service de la rente viagère, il faut que le propriétaire primitif, créancier des arrérages, consente à ce que son débirentier se substitue une autre personne et accepte de tenir cette substitution comme libératoire.
Selon l'article 1979 du Code Civil : le constituant ne peut se libérer du paiement de la rente, en offrant de rembourser le capital, et en renonçant à la répétition des arrérages payés ; il est tenu de servir la rente pendant toute la vie de la personne ou des personnes sur la tête desquelles la rente a été constituée, quelle que soit la durée de la vie de ces personnes, et quelque onéreux qu'ait pu devenir le service de la rente.
Cette disposition légale empêche le débirentier d'imposer le rachat au crédirentier mais celui ci est possible si le crédirentier y consent.
- la résiliation
Selon l'article 1977 du code civil : " Celui au profit duquel la rente viagère a été constituée moyennant un prix, peut demander la résiliation du contrat, si le constituant ne lui donne pas les sûretés stipulées pour son exécution."
Cette disposition n'est qu'une application du principe selon lequel la résolution est la sanction de l'inexécution de ses obligations par l'une des parties au contrat synallagmatique (C. civ., art. 1184) de telle sorte que le juge pourra refuser la résiliation s'il estime que l'inexécution partielle de ses obligations par le débirentier ne présente pas une gravité suffisante pour justifier cette sanction.
- la résolution
Selon l'article 1978 du Code civil : "Le seul défaut de paiement des arrérages de la rente n'autorise point celui en faveur de qui elle est constituée à demander le remboursement du capital, ou à rentrer dans le fonds par lui aliéné : il n'a que le droit de saisir et de faire vendre les biens de son débiteur et de faire ordonner ou consentir, sur le produit de la vente, l'emploi d'une somme suffisante pour le service des arrérages".
Il s'agit là d'une dérogation au principe général de l'article 1184 du code civil aux termes duquel : ""la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.""
Le crédirentier est en droit d'exiger l'exécution forcée du contrat, c'est à dire de faire vendre les biens de son débiteur ou de faire ordonner ou consentir sur le produit de la vente, l'emploi d'une somme suffisante pour le services des arrérages.
Etant ici précisé que selon la jurisprudence, l'article 1978 du Code civil n'est pas applicable si l'inexécution de l'acquéreur porte sur le bouquet, un tel manquement pouvant justifier la résolution du contrat ( CASS 3°Civ, 28 mai 1986, n°85-13112.
Toujours selon la jurisprudence, la résolution judiciaire de droit commun peut être admise en cas de retards de paiement répétés constitutifs d'une inexécution suffisamment grave pour justifier cette sanction notamment au regard de la situation du crédirentier ( Cass 3° Civ 29 janvier 2013 n°11-28 335).
Enfin et surtout, une jurisprudence constante considère que l'article 1978 n'est pas d'ordre public de telle sorte que les parties peuvent valablement stipuler des clauses résolutoires expresses et non équivoques pour assurer la sécurité du paiement des rentes. ( Cass 3°civ 10 nov 1992 n°90-19.712).
De telles clauses résolutoires sont d'interprétation stricte et la jurisprudence exige qu'elles soient mises en oeuvre de bonne foi.
Les tribunaux veillent aussi au strict respect du formalisme prévu par les parties pour leur mise en œuvre.
Ainsi lorsqu'une clause résolutoire est subordonnée à la signification d'un commandement de payer par acte d'huissier elle ne peut procéder de simples mises en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, ni de l'assignation introductive d'instance.
Si elle est prononcée, la résolution de la vente opère rétroactivement et les parties sont remises dans la situation qui aurait été la leur si l'aliénation n'avait pas existé en vertu de l'article 1183 du Code civil selon lequel : "La condition résolutoire est celle qui, lorsqu'elle s'accomplit, opère la révocation de l'obligation, et qui remet les choses au même état que si l'obligation n'avait pas existé......"
Par principe, cela suppose qu'en contrepartie de la restitution de l'immeuble au vendeur, celui ci rende les arrérages qui ont pu être versés et le cas échéant la partie du prix payée comptant.
Le juge peut cependant atténuer les effets de la résolution en accordant des dommages et intérêts au crédirentier d'un montant au moins équivalent à ce qu'il a perçu (Cass 3°Civ 29 janvier 2013, n°11-28.335) et, il peut alors s'opérer une compensation entre sa dette de restitution avec sa créance de dommages et intérêts.
Une clause du contrat constitutif de la rente peut valablement prévoir qu'en cas de résolution, le crédirentier conservera les arrérages perçus.
Une telle stipulation s'analyse comme une clause pénale telle que définie par l'article 1226 du Code civil :"La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution."
De telle sorte que la pénalité prévue peut être révisée par le Juge, et ce même d'office, si elle lui apparaît manifestement excessive ou dérisoire et ce en application de l'article 1152 du Code Civil aux termes duquel : "Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite."
Bibliographie
- Dictionnaire permanent, le Viager.
- Lamy droit immobilier , les ventes à caractère aléatoire
- JCP Notarial formulaire Vente d'immeuble - Vente en Viager Danielle MONTOUX
- Comment fonctionne une vente ou un achat en viager. Service public.fr
- Artaz M Viagers régime juridique et fiscal Delmas 10 édition 2001
- Répertoire DALLOZ droit civil et notamment article " Rentes" Yannick DAGORNE-LABBE
- Code Civil